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Parce qu'il est le premier philosophe dont les oeuvres écrites sont parvenues
jusqu'à nous (car Socrate n'avait rien écrit), parce qu'en 387 avant le Christ
il fonde "l'Académie" une université qui fonctionnera jusqu'en 529 après le
Christ, parce qu'il s'oppose au relativisme dans tous les domaines de la pensée,
Platon (-427-347) est considéré par plusieurs historiens comme le plus grand
philosophe de l'antiquité.
On peut au contraire penser que son grand mérite est de nous avoir fait
connaître celui qu'il appelle "mon cher vieil ami Socrate que je ne crains pas
de proclamer l'homme le plus juste de son temps". Mais on doit aussi
constater qu'il manque de fidélité à son maître sur deux points :
- Socrate savait qu'il ne savait rien
----> Platon prétend tout savoir
- Socrate nous invite à nous occuper
d'abord de nous même ----> Platon semble ne faire de la morale qu'une
condition de l'action politique et Aristote en fera autant.
Même dans ce domaine de la politique, leurs théories ne peuvent que nous
révolter. Nous pourrons donc passer rapidement sur ces deux auteurs.
LA POLITIQUE
Né en -427, Platon est un aristocrate d'Athènes qui a comme premier projet de
s'intéresser à la politique comme il l'explique dans la célèbre 7ème lettre.
Mais il est fasciné par Socrate.
"Je ne sais comment cela se fit, voici que des gens puissants traînent Socrate,
notre ami, devant les tribunaux. D'autres le condamnent et le font mourir...".
"Voyant cela... Je compris que tous les États actuels sont mal gouvernés... Je fus amené à louer la vraie philosophie et à proclamer qu'à sa
lumière seule, on peut reconnaître où est la justice dans la vie publique".
Ainsi donc la philosophie semble devenir une introduction à la politique. La
célèbre allégorie de la Caverne précise que c'est même le philosophe qui doit
régenter la politique.
En voici quelques extraits (début du livre 7 de "LA RÉPUBLIQUE").
LA CAVERNE
Imagine-toi des prisonniers enchaînés dans une caverne et qui ne peuvent tourner
la tête vers l'entrée d'où vient la lumière. Sur le mur, ils ne voient que les
ombres des hommes qui circulent à l'extérieur et croient que ces ombres sont des
réalités. Si on délivre un des prisonniers et si on le force à tourner ses yeux
vers la lumière de l'extérieur il sera tout d'abord ébloui et ne verra pas les
réalités dont il voyait auparavant les ombres. Il sera même tenté de retourné
vers les ombres auxquelles il est habitué. Mais s'il persévère, progressivement
il s'habituera à distinguer les reflets dans l'eau , puis les objets, puis les
astres et peut-être un jour le soleil lui-même."
"Il comprendra même que le Soleil est la cause de tout. Il MÉPRISERA toutes les
convictions des hommes restés enchaînés dans la caverne".
"Si, ensuite, il retourne dans la caverne, il sera maladroit dans l'obscurité.
S'il décrit ce qu'il a vu à l'extérieur, les prisonniers qui ne connaissent que
le jeu des ombres sur la paroi se moqueront de lui et voudront même le tuer".
Avec un peu d'imagination, chaque lecteur pourra deviner la signification de
chaque détail. Le prisonnier libéré et qui a contemplé les Réalités d'en haut
c'est Platon à qui on devrait confier la direction politique des cités...
TROIS ÉCHECS
Et nous avons ainsi la clef de la biographie de Platon. Trois voyages en Sicile
où il espère imposer ses idées aux politiques. Le premier échec se termine mal :
il est vendu comme esclave. Mais il retourne deux fois encore avant de se
contenter de son enseignement à Athènes où il meurt en -348. Cela dit, nous
pouvons essayer de résumer très simplement les réponses de Platon a nos cinq
questions.
1° ÉPISTÉMOLOGIE PLATONICIENNE
Après la mort de Socrate, Platon a beaucoup voyagé. On peut penser qu'il a subi
l'influence de la réincarnation indoue, en tout cas l'influence des
pythagoriciens. Il admire la géométrie, ses définitions précises, ses modèles
parfaits, comme par exemple le "cercle parfait". Il affirme dans le même sens
l'existence réelle de "l'Homme parfait"? C'est ce que les historiens appellent
les "idées" platoniciennes, disons plutôt les "modèles idéaux" puisqu'en
français le mot "idée" s'oppose au contraire à celui de "réalité". A partir de
cette conviction, nous pouvons trouver la réponse platonicienne aux trois
questions épistémologiques.
1°a/ La connaissance est une réminiscence, un souvenir de l'âme qui a
contemplé les "modèles idéaux" et s'en souvient lorsque nous en voyons les
ombres, c'est à dire les réalités individuelles. (cf. index)
1°b/ La valeur de la connaissance dépend du degré auquel chacun est arrivé
: impressions, opinions, nombres, modèles idéaux ou, au sommet, grâce "aux
anciennes et saintes traditions" et au mythes le
BIEN ABSOLU;
1°c/ La correspondance entre notre connaissance et le réel est renversée
car la réalité n'est pas l'individu qui n'est qu'une ombre mais le modèle idéal
: l'Homme Absolu..., ce qui nous fait passer à l'ontologie (voir index -
épistémologie)
2° ONTOLOGIE PLATONICIENNE
Je renvoie le lecteur aux spécialistes de Platon pour préciser l'ORDRE dans
lequel il faut placer la Matière (qui est éternelle, car la question de
l'origine de l'existence n'est pas encore posée) Les Modèles idéalisés, le
Démiurge qui façonne la matière en conformité avec les idées et le Bien qui est
sans doute un des nom de Dieu (?).
Pour comprendre cette ontologie comme l'épistémologie de Platon il faut le
situer en opposition avec le scepticisme des sophistes que nous avons présenté
au chapitre troisième et le scepticisme d'Euclide de Mégare, disciple de
Socrate, et qui passe du "je sais que je ne sais rien" de son maître à "personne
ne saura jamais rien".
3° ÉTHIQUE PLATONICIENNE
Platon nous encourage à MAÎTRISER et à HARMONISER les trois parties de notre âme
: le désir, le courage, la pensée pour gravir les degrés de la BEAUTÉ, celle
d'un corps, celle de tous les corps, celle des âmes, celle de la vertu, celle du
"BEAU".
- "C'est avec l'âme toute entière que
doit s'opérer la conversion".
Cette morale, nous le verrons,
s'appuie sur des croyances religieuses exprimées dans les mythes (voir 5°).
4° POLITIQUE PLATONICIENNE
Puisque l'aristocratie spartiate se dégrade par la richesse et que la démocratie
athénienne conduit à l'anarchie où les parents n'osent plus commander aux
enfants, il faut imposer la technocratie des philosophes avec trois degrés :
- En bas les
producteurs.
- Ensuite les
gardiens -soldats chez qui tout sera mis en commun, biens matériels, femmes,
enfants.
- Au-dessus, la
sélection des magistrats et le philosophe roi.
Platon décrit donc un socialisme collectiviste bien pire que tous les
socialismes modernes, sauf peut-être celui du Cambodge en 1975. Malgré ses
excès, certains voudraient encore le considérer comme le plus grand des
philosophes.
On peut préférer son maître Socrate.
5° ESCHATOLOGIE PLATONICIENNE
C'est en étudiant la réponse à la dernière question de la philosophie que nous
découvrirons le DUALISME de PLATON.
Son PESSIMISME envers le corps va contaminer la spiritualité chrétienne par
l'intermédiaire de PLOTIN (voir 1ère Période chap. 7), ORIGÈNE, le PSEUDO DENIS
et leurs disciples (voir Période centrale chap. 4).
"C'est le corps" dit Platon (Phédon 66c 67a)
"qui nous rend
incapables de discerner la vérité... jusqu'à ce que Dieu nous en délivre".
"Il nous faut CROIRE à ces traditions belles et saintes qui nous RÉVÈLENT
l'immortalité de l'âme, l'existence de jugements et de terribles châtiments à
subir quand elle sera affranchie du corps. C'est pourquoi regardons comme un
moindre mal d'être victimes de graves injustices".
"Que l'âme soit immortelle, on peut je crois l'assurer et , en courir le
risque et il vaut la peine qu'on s'en enchante. !?!"
(Lettre VII)
suite PP chap. 6
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